Prof. Marie-Françoise ALAMICHEL, Université de Marne-la-Vallée


La représentation du Mal chez Layamon

 

 

         Au commencement était le Mal ; dans son prologue, Layamon précise son intention de "(…) of Engle   þa æđelæn tellen" (vers 7) (1) [narrer les nobles faits des Anglais], de dire "þa Englene londe   ærest ahten / æfter þan flode   þe from Drihtene com / þe al her a-quelde   quic þat he funde" (9-11) [qui posséda le sol anglais en premier après le Déluge envoyé par le Seigneur, délude qui détruisit toute vie ici-bas]. Or, la Genèse précise que "Dieu dit à Noé "à cause des hommes la terre est remplie de violence, et je vais les détruire avec la terre." (Gen. 6:13) (2). Aussi le récit de Layamon devrait-il commencer par l'évocation d'un monde nouveau, non souillé, aux habitants purs et innocents. Or, les premiers vers nous apprennent que :

 

þa Grickes hefden Troye; mid teone bi-wonen.
& þat lond iwest; & þa leoden of-slawen.
& for þe wrake-dome; of Menelaus quene.
Elene was ihoten. alðeodisc wif.
þa Paris Alixandre; mid pret-wrenche. bi-won.
for hire weoren on ane da3e; hund þousunt deade. (38-43)

[Les Grecs avaient conquis Troie par ruse. Ils avaient ravagé le pays et massacré les habitants, et, pour venger la femme du roi Ménélas, Hélène, une étrangère que Pâris Alexandre séduisit grâce à un stratagème malhonnête : à cause d'elle, cent mille personnes moururent en un jour !]

 

Ainsi dès le début, le ton est donné : guerre et morts par milliers, ravages et pillages, ruse et stratagème malhonnête ; et c'est inlassablement que le poète conte épreuves, malheurs ou calamités mais dans le but de montrer la grandeur et la puissance des chevaliers victorieux et du roi qui les conduit. Cependant, derrière cette glorification de la guerre, cette exaltation des prouesses et hauts faits de la chevalerie, le lecteur – surtout celui peut-être du XXe siècle – découvre rapidement un âge de peur et de tourment.

 

            Le Mal est tout d'abord affaire sociale. Lorsqu'un roi parvient à établir une paix durable, une de ses premières préoccupations est toujours de promulguer des lois afin d'établir ordre et sérénité dans le royaume. Insécurité sur les routes, hors-la-loi dans les forêts, vols et meurtres sont les délits ou causes de troubles les plus couramment mentionnés. Ces lois concernent principalement la population des villes, la classe des marchands. Or, bien que présentes dans le poème, les personnes d'humble condition ne jouent qu'un rôle de second, voire de troisième plan. C'est aux cours royales et aux chevaliers de haute lignée que Layamon s'intéresse : le Mal provient alors toujours d'une violation du code moral de la chevalerie. Le poète présente un nombre impressionnant de princes ou chevaliers malveillants, envieux, retors, lâches ou encore déloyaux. Etant donné que la société médiévale repose sur l'idée d'un ordre immuable, refuser sa place, bouleverser la hiérarchie ou trahir son seigneur, c'est immanquablement apporter le chaos. En effet, toute perturbation, toute atteinte à l'ordonnance mène le royaume au désastre, à la confusion la plus totale ; il est bien connu que dans la pensée médiévale le désordre est l'image même de l'Enfer – lieu chaotique par excellence. Le poème de Layamon n'est qu'une longue suite de moments troubles entrecoupés de courtes accalmies qui prédisent de nouvelles tempêtes.

 

            La convoitise est le forfait le plus largement répandu, et Layamon en donne d'innombrables exemples. Dans la première partie du poème – avant la naissance de Jésus-Christ – les princes héritiers s'opposent régulièrement entre eux lors de la mort du roi ; le désir de puissance, de posséder seul l'ensemble du royaume se double ainsi d'une querelle, généralement mortelle, avec l'un d son clan, de sa famille alors que le devoir envers ceux de sa propre race implique entraide et loyauté absolues. Le jeune Androgeus, qui pactise avec Jules César, précise toutefois :

 

Ah ne bihæhte ich þe nauere to slæn   Cassibelaune minne æm

Mid nane rihte ne mai ich hine for-don   for ich eam his mæi and his mon (4437-8)

[mais je t'avais précisé que jamais je ne tuerai mon oncle Cassibelaune ; je n'ai pas le droit de lui ôter la vie car je suis de sa famille et son vassal]

 

Les conflits entre princes héritiers sont un motif récurrent avec toujours les mêmes causes, les mêmes conséquences et les mêmes dénouements. Le prince Membriz, par exemple, qui convoite l'ensemble du royaume, s'oppose à son frère, le prince Malin, et la querelle dégénère en une guerre puis se termine par le meurtre de Malin par son propre frère : le désordre et la confusion prennent presque toujours le visage de la violence et de la guerre :

 

Ah þa heora fader wes dæd; þe sunen duden vuelne ræd.
Bi-tweonen heom aræs wal[e] & win; wiðer heo weoren beien.
sle3ht & muchel seorwa; al for heora uniselðe.  (1271-3)

[mais à la mort de leur père, les frères agirent mal. Entre eux, il n'y eut plus que conflit, querelle, destruction et grand malheur. Ils étaient devenus ennemis à cause de leur malveillance] 

 

Lorsque le jeune frère est le vassal du frère aîné, le manquement vis-à-vis du code chevaleresque est d'autant plus grand. Le vassal doit, en effet, faire preuve d'un dévouement entier envers celui qu'il a choisi de servir. Layamon revient sans cesse sur la valeur absolue des liens personnels : le fidélité est une des faces de l'honneur. Revenir sur sa parole, briser la foi que l'on a jurée, c'est tomber dans l'infamie et la disgrâce et Layamon n'a pas de mots assez forts pour condamner les traîtres et les parjures. C'est aussi mettre toute la société en péril et amener le désordre car la paix et la concorde reposent sur des serments individuels et collectifs. Le prince Brennes revient ainsi sur l'hommage qu'il a prêté à son frère Belin et il s'ensuit une guerre meurtrière à laquelle leur mère met fin en les réconciliant.

 

            A l'origine de ces actes de trahison, on trouve souvent un ou des mauvais conseillers. Or, un bon chevalier doit non seulement faire preuve de courage et de force mais il doit aussi prodiguer de bons conseils à son seigneur, ce dernier devant être plein de sagesse : il serait intéressant, à cet égard, de compter le très grand nombre de fois où Layamon utilise le mot wise. A cette sagesse, il oppose la malveillance des mauvais conseillers et l'irréflexion de ceux qui les écoutent. Brennes est ainsi poussé au mal par des chevaliers à son service :

 

Ah Brennes hauede vuele men; his æðelene heo a-merden.
þeo ælche dæie hine larden; luðere craftes.
þat he sculde wih his broðer; forewa[r]de breken. (2151-3)

[mais Brennes avait des hommes au cœur mauvais qui vinrent tâcher sa noblesse. Tous les jours ils lui conseillaient des actes maléfiques comme de rompre son allaince avec son frère]

 

            Plus grand encore est le déshonneur de celui qui commet le mal en ayant recours à eds subterfuges, des ruses. L'inconnu et le faux font peur. Toute tromperie implique confusion et place les êtres dans un monde de perversion où le démon règne en maître absolu : l'image d'un univers à l'envers, chaotique, apparaît à nouveau. Le cour de [Grande-]Bretagne est souvent confrontée au faux et il n'en découle que malheur et infortune. Le poète insiste sur les fausses paroles, les mensonges. Les deux filles aînées du roi Leir ne prétendent aimer leur père que pour mieux le trahir. Le roi Locrin, non seulement ne souhaite pas respecter sa promesse d'épouser la fille de Corineus – Duc de Cornouailles et fidèle compagnon de Brutus – mais aussi trompe tout son peuple et toute sa cour en ne renvoyant pas sa concubine et en la cachant sous terre, à Trinovant, hors de la vue de tous :

 

& he hit seide; soð þeih hit nere.
þat he wolde Æstrilde; senden vt of londe.
Ah ne dude he nawiht swo; for swiken he þohte.

(...)
Þonne he to Trinouant wende; þenne seide he to Wendoleine.
þat he wolde beon seoueniht þære; & his godd hure.
inne di3elnesse; & elles he ne durste.
þat ei mon wuste; whet he þer sohte.
Guendoleine him ilefede; luðere weren his craftes. (1173-5 & 1194-8)

[et il dit, bien que ce ne fût que mensonge, qu'il chasserait Astrild de ce pays. Mais il n'en fit rien car il songeait à une ruse. (…) Avant de se rendre à la Nouvelle Troie, il dit à Gwendoleine qu'il resterait là sept nuits pour adorer son dieu en secret et que personne d'autre ne devaitchercher à connaître le but (de son voyage). Gwendoleine le crut. Ses actes étaient dictés par le Mal]

 

Le désordre ne tarde pas à atteindre le royaume, la guerre et la mort prenant le dessus.

 

            Un autre moyen de tromper les autres est de "faire semblant", soit en agissant hypocritement, soit en se déguisant. Ceux qui se déguisent dans le poème ne le font jamais pour une bonne cause (sauf, peut-être Uther ?). Un déguisement conduit généralement au mal, à la violence et au meurtre. Le païen Appas se déguise en moine pour approcher le roi et l'empoisonner :

 

Appas eode to bure; & þesne balu mæinde.
he wes an hæðene gume; ut of Sax-londe i-cume.
Muneckes claðes he nom an; he scar his crune ufenen.
he nom him tweien iueren; & forð he gon fusen.
& wende anan rihte; in-to Winchæstre.
swulc hit weore an hali mon; þe hæðene deouel; (8812-7)

[Appas se rendit dans sa chambre et considéra ce forfait ; (Appas) était un païen d'origine saxonne. Il enfila des habits de moine et se tonsura. (…) Il entra aussitôt dans Winchester tel un homme saint, de diable païen !]

 

Avec cet exemple, on voit clairement que Layamon associe le fait de se déguiser à un acte diabolique. D'autres types de tromperie sont aussi présentés comme des recours malhonnêtes, immoraux comme le fait de ne pas se battre ouvertement, de ne pas s'exposer lors d'un conflit, à la différence d'un duel où chaque combattant montre son visage. Le poète fait part de plusieurs meurtres perfides tel l'épisode où les hommes du Saxon Hengest viennent (prétendument désarmés) à un rendez-vous fixé par le roi Vortigern et tuent les Bretons grâce aux couteaux cachés dans leurs jambières. De même, plusieurs rois sont tués de façon déloyale au moyen de poisons ou par la sorcellerie. Dans un même ordre d'idée, plusieurs chevaliers sont trompés, tués ou poussés à commettre un forfait après avoir été enivrés afin d'être facilement manipulés. L'utilisation de langues étrangères est également un moyen pour duper l'adversaire et les Saxons ont recours plusieurs fois à ce stratagème. Layamon a développé tout un vocabulaire autour du faux pour condamner ce monde de perversion et indiquer que la ruse est contraire à l'honneur, à la vertu, au Bien : le mot vuele [le Mal] revient sans cesse ainsi que unhende [mauvais], luđer [mauvais], 3æp & war [rusé et prudent], fls [déloyal], swike [traître] ou les formules "he wes of ufele war" [il connaissait bien le Mal] et "þe wurse him wes fil neh" [le Diable était tout près de lui], aucune condamnation plus forte ne semblant possible que cette dernière. Le démon s'est emparé de l'homme ou s'est installé au royaume : ce désordre plusieurs fois mentionné prend la forme de la guerre et de ses ravages. Villes pillées et incendiées, églises détruites, campagnes dévastées, chevaliers pendus, femmes violentées, enfants noyés, bétail dispersé et abattu ; c'est à qui fera preuve de la plus grande cruauté : l'univers entier devient combat et tout n'est plus que ruine. C'est que les rois et chevaliers ne sont pas toujours des guerriers bienfaisants et mettent souvent leur épée au service de leur propre enrichissement mais c'est aussi que le royaume de [Grande-]Bretagne doit endurer les attaques répétées, les invasions des peuples - selon le poète – belliqueux, sanguinaires et proches de Satan parce que païens : le Mal s'incarne alors dans la figure de ces Ennemis de Dieu et le roi devient une sorte de Saint guerrier au service du Bien.

 

            Le roi breton et chrétien atteint la perfection en la personne d'Arthur : riche, puissant, généreux, lettré, avisé, guerrier émérite, il apporte paix, concorde et justice au royaume. Intermédiaire entre le peuple et Dieu grâce à son sacre, le roi chrétien doit combattre le paganisme et promouvoir le christianisme dans le monde entier. Les païens sont considérés, dans le poème, comme des êtres à la solde des forces du Mal. Les premiers Germains à atteindre la [Grande-]Bretagne sont Hengest et Horsa et Layamon précise :

 

            Ah heo weore hæđene   þat wes hærm þa mare (6886)

            [mais c'était des païens – il n'y avait pas défaut plus grand !]

 

Les Norvégiens Wanis et Melga sont appelés "Goddes Wiđersake"  [les adversaires de Dieu]. Les païens sont condamnés à l'Enfer – châtiment suprême :

 

Falewede feldes   of fæie blode

& þa heđene saulen   helle isohten (9142-3)

[les champs étaient rouges du sang des tués et les âmes païennes rejoignaient l'Enfer]

 

Les guerres qu'engendrent leurs arrivées témoignent de leur cruauté, voire de leur sauvagerie ainsi que de leur esprit retors. Le malheur s'abat sur l'ancien royaume de Brutus :

 

Þa wes Ænglene lond; mid ærmþe of-fulled.
her wes wop & her wes rop. and reouðen vniuo3e.

muchel hunger & hæte; at æuer-ælche monnes 3ete.

[alors le malheur s'abattit sur l'Angleterre. Il y eut des pleurs, des lamentations et une affliction indescriptible. La famine et la haine étaient à la porte de chacun !]

Layamon ne leur reproche pas seulement ces guerres, pillages et des destructions. Il déplore, à plusieurs reprises, que la langue saxonne en soit venue à supplanter le breton et qu'ainsi les noms de lieux aient perdu leur beauté originelle ; cette corruption lui semble impardonnable. Ainsi la Cornouailles s'appelle-t-elle d'abord Corinee mais "Seoððen þurh þa leoden   þe i þon londa weoren / heo clepeden hit Cornwaile   þurh heora sotliche cure" (985-6) [par la suite, à cause des peuples qui étaient dans le pays, ils l'appelèrent Conouailles par un choix insensé]. Ou encore – et la condamnation est plus explicite :

Seoððen her com vncuð folc; faren in þessere þeode.
& nemneden þa burh Lundin; an heore leode-wisen.

(…)
 Seoððen comen Normans; mid heore nið-craften.
and nemneden heo Lundres; þeos leodes heo amærden;
Swa is al þis lond iuaren. for uncuðe leoden;

(…)
 & falden þene ælden nomen; æfter heore wille. (3543-4/3547-9/3552)

[plus tard, des étrangers arrivèrent dans ce pays et appelèrent la ville "Lundin" selon leur usage. (…) Puis arrivèrent les Normands et leurs méfaits. Ils nommèrent (la ville) Lundres. Ils exterminèrent ce peuple (=les Bretons). Ainsi en alla-t-il de ce pays car des peuples étrangers le conquirent (…) et abandonnèrent les anciens noms à leur gré]

            Les païens – du fait même qu'ils ne sont pas chrétiens – sont d'autant plus représentés comme l'incarnation du Mal qu'ils peuvent revêtir le visage de la séduction. Il n'y a pas péché plus grand pour Layamon que de pactiser avec les païens d'une façon ou d'une autre. Le roi Vortigern est le traître par excellence : il déteste les Bretons, favorise la venue des Germains, abjure sa foi et épouse une païenne, "Þat wes swiðe ladlic þing   þat þe Cristine king /
luuede þat haðene maide   leoden to hærme" (7172-3) [c'était chose tout à fait détestable que le roi chrétien épousât la jeune païenne, pour le malheur de son peuple !]. Le poète présente de nombreux cas de chevaliers qui se dressent contre leur roi et qui font appel à l'aide d'étrangers païens : ces Bretons sont doublement infidèles à leur seigneur et à leu Dieu. Les deux plus grands traîtres à cet égard sont bien entendu Vortigern et Modred. C'est pourquoi de nombreux sujets de Vortigern le condamnent et lui refusent leur ancien dévouement :

Þu ært þurh us bald king; inne þissen Brutene.
& þu hafuest þe biwunnen; hærm & muchele sunnen.
ibroht heðene folc; 3et hit þe ihærmeð.
& þu letest Godes la3en; uor uncu[ð]e leoden.  (7264-7)

[tu es, de par nous, le puissant roi de la Bretagne et tu t'es couvert de tort et de nombreux péchés. Tu as fait venir des païens – mais cela te cause préjudice – et tu as abandonné le loi de Dieu pour un peuple étranger]

            L'univers du Brut est ainsi d'un manichéisme élémentaire : le paganisme et le Mal d'un côté, le christianisme et le Bien de l'autre. Cette opposition fondamentale renferme la logique de la seconde partie du poème, c'est-à-dire une fois que la [Grande-]Bretagne est évangélisée. Il y a donc une guerre juste, des guerriers bienfaisants qui mettent leur force et leur courage au service de Dieu en massacrant des armées entières de païens, qu'ils défendent leur royaume ou qu'ils aillent conquérir des territoires sur le continent. C'est qu'il s'agit de montrer la puissance et la gloire du roi breton et celles du roi céleste. Sur le champ de bataille, tous les rois et guerriers chrétiens demandent à Dieu, à Marie et aux Saints de leur accorder la victoire. Ainsi s'exclame, par exemple, le roi Uther : 

And ich wullen bidden Drihten; þat scop þæs dæies lihten.
& alle þaie hal3en; þa an hæfene hæh3e sitteð.
þar ich on þissen felde; mote beon ifroured.
Nu fuseð heom to swiðe; fulste eou Drihten.
þe al-waldinde God bi-witen mine þeines. (9750-4)

[et je vais demander en prière au Seigneur qui créa la lumière du jour et à tous les saints qui trônent haut dans le ciel, que je puisse être assisté sur ce champ (de bataille). Maintenant allons rapidement à leur rencontre. Que le seigneur vous aide, que le Dieu tout puissant protège mes chevaliers !]

Parfois, ils vont plus loin et prient pour que Dieu anéantisse leurs ennemis : le roi Arthur, dont le bouclier est orné d'un portrait de la Sainte Vierge, s'écrit :

Iseo 3e mine Bruttes; here us bihalfues.
ure iuan uulle; Crist heom a-ualle. (10031-2)

["Voyez, mes Bretons, ici à côté de nous, nos ennemis mortels. Jésus-Christ, anéantis-les !"]

ou, plus loin :

heo beoð for-demed alle mid Drihttenes fulste. (10572)

["Ils seront tous mis à mort avec l'aide du Seigneur !"]

Il n'est pas rare, dans le poème, de voir les Bretons prier pour que les âmes des païens, qu'ils viennent de tuer, ne connaissent aucun repos. De nombreux critiques ont reproché à Layamon son penchant pour les scènes violentes, le plaisir évident qu'il prend à décrire les tourments des blessés et des morts. Mais il me semble qu'ils n'ont peut-être pas vu la logique du poète. Celui-ci, en effet, se réjouit du malheur de ceux qui sont à la solde des forces du Mal : parjures, traîtres, lâches ou païens. Par contre, il se lamente lorsque ceux qui sont dans leur droit ou au service du Bien sont les victimes innocentes des malveillants. C'est pourquoi les atrocités commises par un Brutus ou un Arthur ne sont pas présentées comme telles et sont, au contraire, glorifiées, saluées comme de hauts faits car elles prouvent la toute puissance et l'éclat du souverain et de ses chevaliers.

            Le  Mal du point de vue religieux ne se limite pas à cette condamnation du paganisme et la notion de péché est tout à fait présente à l'intérieur du clan chrétien : Layamon blâme avec vigueur le jeune prince Constantin qui abandonne sa condition de moine et revient sur ses vœux pour le plaisir, avoue-t-il lui-même, de s'entendre appeler "roi". Le père abbé le supplie de ne pas commettre cette faute et de ne pas déchaîner la colère de saint Benoït. Ainsi s'adresse-t-il à Vortigern venu chercher le jeune moine pour en faire un roi fantoche :

Seie me þu wode cniht; whi dest þu swa muchel vnriht.
Þu bi-nimest us ure broðer; (…)

(…)

& ne wrað þu noht; Sæint Benediht. ne do þu him nan vn-riht; (6565-6 & 6568)

["Dis-moi, chevalier insensé ! Pourquoi commets-tu un tel méfait ? Tu nous prives de notre frère. (…) N'irrite pas saint Benoît, ne lui fais pas de tort !]

De même, Layamon réprouve la sorcellerie, art maléfique. Ceux qui s'y adonnent pactisent avec le Démon comme, par exemple, le roi Bladud :

he cuðe þene vuele craft; þat he wið þene Wurse spæc.
& al þat euer he wolde; þe Wurse him talde.
(1419-20)

[il connaissait la sorcellerie si bien qu'il communiquait avec le Diable. Et le Diable lui disait tout ce qu'il voulait]

 

            Les péchés profondément liés à la nature humaine jouent aussi un grand rôle : on a déjà vu que les conflits entre frères héritiers ont pour origine la concupiscence mais celle-ci se manifeste également dans la convoitise de la femme d'un autre. L'exemple le plus célèbre est celui du roi Uther qui déclenche une guerre meurtrière en courtisant la femme du Duc Gorlois – Ygaerne, future mère d'Arthur. Très tôt, les chrétiens cherchèrent à dénombrer, classifier et hiérarchiser les péchés humains. Or, la Bible n'apporte pas de réponse précise. Saint Grégoire (mort en 604) retint sept péchés majeurs auprès de l'orgueil : la vaine gloire, l'envie, la colère, la tristesse, la cupidité, la gourmandise et la luxure. M.W. Broomfield (3), dans son étude sur les péchés capitaux, précise qu'il faut attendre le XIIIe siècle pour voir les péchés prendre une place grandissante dans les œuvres littéraires et que – exception faite de l'Ancrene Riwle – ne s'y intéressa vraiment qu'à partir du XIVe siècle. Layamon ne fait aucune référence explicite aux péchés capitaux. Toutefois, il y a un long passage très intéressant pour cette question dans le Brut. A partir de la mort du roi Sillius (vers 3164) sont présentés des rois d'ordre secondaire puis commence une interminable liste de souverains se succédant à la tête du royaume de [Grande-]Bretagne et qui n'ont droit qu'à quelques vers soit parce qu'ils n'ont régné que très peu de temps soit parce que leur règne n'a pas eu grand intérêt. Layamon, toutefois, s'attarde un peu sur certains monarques et l'on constate que c'est, en général, pour insister sur un défaut prononcé du souverain en question et que l'on trouve ainsi réunis à quelques vers de distance cinq des sept péchés capitaux : la paresse n'est pas mentionnée et le poète ne fait pas non plus référence à l'envie – celle-ci étant présente presque constamment dans le poème. Chaque roi se voit attribué un seul péché, le poète ne nous donnant à plusieurs reprises aucun autre détail sur le souverain. De plus ces cinq passages se présentent comme des épisodes indépendants avec la mort des rois à chaque dénouement. Si l'on ne peut pas parler d'allégorie, cette liste de rois fait cependant déjà penser aux processions des péchés capitaux des œuvres ultérieures du Moyen Age.

            Layamon introduit en premier la colère avec le roi Morpidus – souverain également décrit comme trop cruel. Le poète insiste sur le fait que la colère aveugle le roi dans ses jugements :

A-nan se he wes wrađ wiđ eni mon   i þan stude he hine wolde slæn

Nere he na swa riche cniht   þat he hine ne sloh forđ riht

Weore hit rih weore hit woh   i þon stude he hine sloh (3175-7)

[dès qu'il était en colère contre quelqu'un, il le tuait sur le champ ; il n'y avait pas de chevalier, aussi puissant fût-il, qu'il n'osât tuer aussitôt ; que ce soit juste ou injuste, il le tuait sur le coup]

Exceptionnellement, ce même Morpidus représente aussi l'orgueil. Le roi, tel Beowulf, pense pouvoir terrasser seul un monstre marin qui décime la population du royaume. L'épisode se termine par les doubles morts de l'animal et du roi et le poète nous donne la moralité de l'histoire : "þus ferde þe king   for he wes to kene / for þe mon is muchel sot   þe nimeđ to him seoluen / mare þonne he ma3e walden (…)" (3246-8) [ainsi mourut le roi parce qu'il était trop téméraire. Car celui qui s'impose plus qu'il ne peut maîtriser est un grand sot]. Vient ensuite l'avarice avec le roi Argal. Celui-ci accumule richesses et trésors et est finalement banni à cause de son avidité au gain :

what-se hæfde richedom; he hine makede wræcche mon.
(...)
al his motinge; was ful of 3itsinge.
He somnede to-gædere; gærsumme muchele.  (3268 & 3270-1)

[si quelqu'un était riche, il le mettait dans la misère. (…) Toutes ses paroles débordaient de convoitise. Il accumula beaucoup de trésors]

La gourmandise se présente sous les traits du roi Chérin qui perd toute sa dignité et se désintéresse de son royaume, et de son peuple, pour la boisson :

(...)                  muchel he dronk mede and win;
weoren al his du3eðen. bilefed oppe drenche;
and al he leas his wurðscipe. for þon win-scenche; (3453-5)

[il buvait beaucoup d'hydromel et de vin. La boisson anéantit toutes ses facultés et il perdit son honneur à cause de son penchant pour le vin]

Enfin, le roi Aeldolf s'adonne à la luxure, déshonorant toutes les femmes qu'il rencontre :

Nes nan swa god wif i þon londe. þe he walde.
3if heo wes a wiht hende; þat he ne makede hore.
þæh hit weoren an eorles wif; he bi-nom hire al hire æðelen.
þe 3unge wifmen & þe ælde; he makeden to sconde. (3502-5)

[il n'y avait pas de femme – aussi vertueuse fût-elle – dans le pays qu'il gouvernait qu'il ne traitât en fille de joie si c'était une personne gracieuse. Même si c'était la femme d'un Comte, il l'outrageait dans son honneur : il déshonorait les femmes jeunes et vieilles]

On peut ajouter que dans le domaine sexuel, bien plus loin dans le poème, Layamon nous parle du roi Malgus en précisant : "he luuede þanne sunne   þe lađ is ure Drihtene" (14392) (il aimait le péché qui répugne à notre Seigneur], c'est-à-dire l'homosexualité. Le poète condamne fortement le souverain utilisant deux fois, à quelques vers de distance, le mot sunne.

            Quant à la paresse, elle donne lieu à un débat très intéressant entre deux chevaliers du roi Arthur lorsque ce dernier hésite à se rendre à Rome. Un premier chevalier – Cador – prône de partir en campagne contre les Romains car, dit-il, l'oisiveté ou l'absence de guerre et de combat, déshonore un guerrier :

For idelnesse makeđ mon   his monscipe leose

Ydelnesse makeđ cnihte   for-leosen his irihte

Idelnesse græiđeđ   feole uuele craften

(...)

For 3are we habbeođ stille ileien   ure wurđscipe is þa lasse (12433-5 & 12438)

[car l'oisiveté fait perdre leur virilité aux hommes. L'oisiveté fait perdre leurs droits aux chevaliers, l'oisiveté est à l'origine de nombreuses mauvaises actions. (…) Nous avons été inactifs trop longtemps, notre honneur est au plus bas ! ]

A Cador s'oppose Walwain qui affirme que la guerre est une des figures du Mal :

For god is griđ and god is friđ   þe freoliche þer haldeđ wiđ

And Godd sulf hit makede þurh his Godd-cunde

for griđ makeđ godne mon   gode workes wurchen (12455-7)

[la paix et la concorde sont bonnes si on les respecte librement. Et Dieu lui-même, dans sa divinité, les créa car la paix permet à un être bon d'agir dans le Bien]

La guerre est, on l'a vu, l'image la plus évidente du désordre. Le Mal, toutefois, est symbolisé par de nombreuses autres formes et se présente sous des traits variés et multiples.

 

            Le Mal renvoie à un mystère, à un monde de l'inconnu, du trouble, de l'invisible. Tout ce qui touche aux franges de l'invisible ou de l'inexplicable fait peur aux hommes du Moyen Age. Chez Layamon, la mer symbolise souvent cet ailleurs inquiétant. C'est de la mer qu'arrivent tous les dangers : calamités naturelles, invasions ennemies, monstres de toutes sortes. S'aventurer sur les flots, c'est aller à la rencontre d'un univers changeant, imprévisible et redoutable. Layamon a écrit certains de ses plus beaux passages au sujet de la mer. Ses descriptions de tempêtes transmettent tout son désarroi devant le déchaînement des forces destructrices de la nature. Nulle part montre-t-il mieux la fragilité des êtres humains que dans le naufrage de quinze bateaux de femmes, dont (sainte) Ursule, se rendant en (petite) Bretagne et criant à Dieu leur peur et leur désespoir (5984). Les pirates sont dans le Brut des représentants tout puissants de la Mort que tout marin croise sur son chemin. Les rivières symbolisent aussi la mort dans le poème ; il s'agit de mort violente, concrète, décrite avec beaucoup de réalisme. Ainsi au cours des batailles, les fleuves et les rivières se teintent toujours du sang des guerriers, ces barrières liquides sont infranchissables et deviennent rapidement un repère de lecture. En effet, dès que le nom d'un cours d'eau apparaît, le lecteur sait aussitôt que les ennemis des Bretons sont condamnés et n'ont aucune chance d'échapper à la noyade. Toutes les frontières liquides, sans exception, sont donc symboliques. On sait d'ailleurs que le Moyen Age situait l'Enfer a cœur de la mer.

            Autre monde inconnu et inquiétant : le ciel. Toute manifestation céleste dans le Brut engendre la peur des humains. Comètes et étoiles sont-elles envoyées par Dieu ou par les puissances sataniques ? Pour Layamon, en tout cas, il est clair qu'elles préfigurent, en général, une catastrophe. Il est bien connu que dans la réalité l'éclipse de 1033 fut considérée comme un présage de la fin du monde. Dans le Brut, l'aigle qui s'abat sur le château de Cetesbury annonce la mort du roi. L'astronome/astrologue Magan parle des Incubi Daemones qui peuplent le ciel et qui s'amusent à duper les humains. Le roi Uther, qui aperçoit une comète, est pris d'une grande frayeur jusqu'à ce que Merlin lui explique qu'elle est le signe de la mort, déjà survenue, de ses deux frères aînés et surtout celui de la naissance d'un fils à venir.

            Si l'invisible fait trembler, il en va de même pour tout ce qui ne peut pas s'expliquer. Lorsque le roi Vortigern cherche à se faire construire un château fort sur le mont Reir et que chaque nuit les murs s'écroulent, Layamon précise que "þa wes sari þe king   & sorhful þurh alle þing / swa wes al þa uerde   lađliche of færed" (7729-7730) [alors le roi fut affligé et extrêmement attristé. La foule était tout aussi terrifiée]. Pour exorciser le mal, Vortigern a recours à des incantations et à des magiciens qui jettent leurs sorts. Seul Merlin apportera la solution en expliquant que deux dragons se battent sous la montagne toutes les nuits. Le Mal est en effet très souvent symbolisé par des animaux et le dragon est l'image même du chaos et de l'erreur : le feu qui sort de sa gueule rappelle bien évidemment celui de l'Enfer. Arthur, dans un rêve prémonitoire, voit une de ces créatures destructrices :

Þa com þer westene; winden mid þan weolcnen.
a berninge drake; (...)
mid his feure he lihte. al þis lond-riche; 12772-4)

[alors arriva de l'ouest, tournoyant avec les nuages un dragon crachant du feu. (…) Avec son feu, il incendiait tout le royaume]  

            Les monstres marins sont une autre figure du Mal : les sirènes, par exemple, sont des êtres fourbes qui cherchant à ensorceler Brutus et ses compagnons (663). Le roi Morpidus affronte un animal terrifiant qui fait penser à une baleine (3209). Ces animaux sont des créatures hors normes, à la puissance physique extraordinaire parce que le Mal est avant tout violence et agressivité. C'est aussi ce que représentent les géants qui détruisent tout sur leur passage tel ce monstre décrit par un des chevaliers d'Arthur :

he seide þat þer wes icumen; a scaðe liðe.
of westward Spaine; wel dreori feond
and inne Brutaine. bisi wes to harme;
bi þere sæ-side. þet lond he weste wide; (12804-7)

[il raconta qu'un monstre était arrivé d'Espagne, par l'ouest ; c'était un démon hideux. Il était fort occupé à ravager la Bretagne. Il dévastait toute la région côtière]

Le géant Geomagog auquel Brutus est confronté lors de son arrivée en [Grande-]Bretagne est appelé godes wiđersaka. Or c'est l'expression que Layamon utilise pour définir Satan. L'Ennemi, þe wurse,  n'est pas donné de représentation concrète dans le poème : c'est une force, une présence, un état, une condition dont chacun peut s'approcher par ses actes. Le Mal est donc en chacun de soi et l'homme gagne son Salut, ou se trouve condamné, par sa façon d'agir. Dans la tradition chrétienne, le péché se définit comme "une opposition de la volonté de l'homme à celle de Dieu" (4). C'est pourquoi Layamon précise chaque fois qu'un être commet le mal que "þe wurse him wes neh". Toute faute, tout péché est en effet puni : en cela Layamon fait oeuvre morale. Dieu est le juge suprême, celui qui envoie les châtiments. 

            Le Dieu de Layamon est rarement bon mais il est juste – si l'on accepte la logique du poète. Il envoie ses foudres sur les païens, protège les chrétiens dans les batailles et châtie tous ceux qui s'écartent du bon chemin. Tous les personnages ont peur de ce Seigneur suprême : lorsque Vortigern ramène à la cour le jeune Constance après lui avoir fait quitter son monastère, aucun religieux n'accepte de couronner le prince :

for heo ne dursten for Gode; don þer þa misbode.
nime þane munec child; & makien Brut-londes king.
(6613-4)

[ils n'osaient pas commettre cette offense par peur de Dieu : prendre l'enfant-moine et le nommer roi de Bretagne]

Les signes de la colère de Dieu sont multiples : famines, maladies inexplicables, sécheresses, nuages de mouches ou pluies de sang :  

From heouene her com a sulcuð flod; þre dæ3es hit rinde blod.
þreo dæies and þreo ni3t; þat wæs swuþe mochel pliht.
(1943-4)

[des cieux tomba un déluge prodigieux ; il plut du sang pendant trois jours et trois nuits. Ce fut un moment très difficile.]

Lorsque le prélat de Rome, Augustin, arrive à Dorchester pour christianiser la ville, les habitants se moquent de lui et le chassent à coups de raies ! Le prélat, furieux, s'adresse à Dieu qui envoie sa vengeance sur la ville tout comme dans l'Ancien Testament :

Vre Drihte hine iherde; in-to þere heouene.
and his wreche sende; an wræstliche þan folke.
þa þe rih3en tailes; hangede a þan clarkes.
Þa tailes heom comen on. þer-uoren heo ma3en iteled beon. (14762-5)

[notre Seigneur l'entendit au ciel et il dirigea sa vengeance sur le misérable peuple qui avait accroché les queues de raies sur les clercs. Les queues se fixèrent sur eux, par conséquent ils eurent une queue]

La punition la plus sévère de Dieu est bien évidemment la condamnation à l'Enfer. De même qu'il n'y a pas de description du diable dans le poème, il n'y a pas non plus de représentation explicite de l'Enfer mais il y a une véritable topographie du mal qui peut se résumer par l'antithèse habituelle du Haut et du Bas ; l'Enfer revêt l'image traditionnelle du gouffre : païens, monstres, géants connaissent la mort dans des vallons, précipices, défilés. De plus, pour Layamon, on tombe dans le Mal et on s'y noie : le poète précise toujours que les êtres damnés sombrent (heo sinken in to helle). On peut se demander, enfin, si pour Layamon la victoire la plus nette du mal n'est pas la relégation aux confins du royaume, à la fin du poème, des Bretons et l'installation définitive des Anglais dans le beau territoire montré à Brutus par Diane pour s'y installer et prospérer.

 

            Layamon veut faire œuvre morale : au niveau individuel, le Mal ne triomphe pas. Tout pécheur est immanquablement puni. Le poète d'ailleurs met en garde : pour tout être malveillant, il précise – par anticipation – la punition à venir, voulant indiquer le caractère inéluctable du châtiment. Le message moralisateur du poète se manifeste également par les nombreux proverbes et autres phrases édifiantes qui ponctuent le texte. Là encore, Layamon rappelle que les forces du Mal ne sont pas bonnes à suivre. Toutefois, il est clair que l'intérêt premier du poète est ailleurs : le Brut n'est pas un appel pressant à la conversion ou à la pénitence. C'est un long poème héroïque où les héros sont des guerriers, les qualités premières la force physique et le courage, un poème qui relate l'âge d'or des Bretons lorsque ceux-ci dominaient tout l'Occident en massacrant leurs ennemis par milliers.

 

NOTES :

(1) G.L. Brook & R.F. Leslie, éd., La3amon: Brut, Londres, New York, Toronto, Oxford University Press, 1963 & 1978, Early English Text Society n°250 & 277.

(2) TOB, Paris : Editions du Cerf, 1988, p. 61.

(3) M.W. Broomfield, The Seven Deadly Sins, Michigan State College Press, 1952.

(4) Jean Delumeau, Le Péché et la peur, Paris : Fayard, 1983, p. 212.